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Mont Granier (1933 m)

    â–³ Chartreuse, Savoie - France

- en boucle par le Pas des Barres et la Balme à Collomb -

Vendredi 25 juillet 2014

L'histoire au bout des doigts...

La plus ancienne représentation connue de l'effondrement de la face Nord du Granier. Gravure sur bois extraite du Liber chronicum de Hartman Schedek, Nuremberg.

     A l'image de la tétralogie de Wagner avec ses quatre opéras inspirés de la mythologie germanique : Der Ring des Nibelungen, Chambéry possède également son anneau, composé de sommets "légendaires" la dominant : le Nivolet, la Dent du Chat, la pointe de la Galoppaz et le Granier.

 

Ce dernier est devenu célèbre de part la catastrophe qu'il engendra dans la nuit du 24 au 25 novembre 1248, lorsq'un pan de sa face nord se détacha et vint engloutir les villages situés en contrebas, faisant environ 5000 victimes. De ce vaste éboulement, les Chambériens ont hérité d'un panorama "dolomitesque" avec l'une des plus grandes falaises calcaires de France dont l'à-pic fait près de 700 m, le lac de Saint-André (communes de Les Marches), mais également un terroir propice à la production viticole : les Abymes.

La face nord, encore très instable, n'est guère favorable à l'escalade. Il a fallu ainsi attendre 2003 pour qu'elle soit vaincue dans son intégralité.

Depuis, le printemps 2016, elle s’effondre régulièrement à cause de la gélifraction.

     Le Granier est également favorable au développement des légendes les plus folles. Dernièrement, le grand journaliste chambérien, Jean Bertolino, prix Albert Londres 1967, a fait de la montagne le théâtre de son dernier roman : Et je te donnerai les trésors des ténèbres. Le Granier serait le reliquaire naturel de la plus grande relique du monde catholique : le Saint-Suaire, qui n'aurait pas, contrairement à ce que l'on pense, quitté Chambéry pour Turin, la nouvelle capitale des Etats de Savoie, en 1578.

Le Granier jusqu'en 1860, date du rattachement de la Savoie à la France, constituait une frontière entre les deux états. De fait, il est courant de croiser dans ses environs des bornes frontières (vers le lac Noir, la Croix de l'Alpe, entre les Marches et Chapareillan...) floquées des armes de la Savoie d'un côté et des fleurs de lys françaises de l'autre.

     En ce mois de Juillet pluvieux, je profite d'une journée ensoleillée pour partir à la rencontre de ce géant dominant Chambéry de sa face nord si imposante, qu'elle en obligerait presque à baisser les yeux devant elle. A force de contempler ce sommet tous les jours, je parts donc de bon matin et attaque la montée, après avoir garée la voiture à la Plagne, vers 7h15. La montée est rapidement assez raide, comme bien souvent dans les pré-alpes. Elle s'effectue en forêt jusqu'au col de l'Alpette. Je suis seul, entouré seulement des chants des oiseaux et du crépitement des aiguilles de conifères sous mes pas. Une douce odeur de résineux s'élève jusqu'à moi alors que le souffle chaud du vent frappe déjà mes tempes.

 

Après le col de l'Alpette, le sentier se fait plus doux, au milieu des pâturages où l'on croise des troupeaux montés en estive.

Le panorama se dégage également avec en point de mire la cime du Mont-Blanc qui se détache à peine de la brume tenace qui recouvre tous les massifs.

 

Au Pas des Barres, j'attaque la seule difficulté de l'ascension, un court passage câblé permettant de se isser sur le vaste plateau de l'Alpette qu'il me reste à traverser. Sur ce versant, le Granier est beaucoup plus paisible. Il n'en reste pas moins qu'il faut s'en méfier du fait de la présence de failles dans le lapiaz.

Alors que je parcours le plateau, un cris strident me tire de mes songes. Au dessus de moi, sur une vaste pierre, se tient un bouquetin que je semble avoir dérangé et qui visiblement n'est pas des plus heureux de ma présence. Juste le temps de prendre une photo et je m'éclipse.

 

    1h10 d'effort, j'arrive au sommet matérialisé par une borne. Puis, je descends en direction de la croix située quelques mètres en contrebas (1898 m).

Une petite halte pour se restaurer et je reprends le sentier de descente avant que la foule ne vienne perturber ma solitude matinale. Une petite dixaine de minutes où je reviens sur mes pas et je bifurque en direction de la Balme à Collomb. Le sentier est abrupte, raviné et même affaisé par endroits. Il faut donc être des plus vigilant.

J'emprunte ensuite un sangle typique du massif avant d'atteindre la Balme à Collomb.

Cette grotte est célèbre pour la découverte qui y a été faite en 1988.

 

 

En effet, à l’automne 1988, deux membres du Spéléo Club de Savoie, Marc Papet et Pierre Guichebaron, réussissent à percer les secrets du lieu. Au retour d’une expédition, un courant d’air froid est détecté au ras du sol, sur l’un des côtés de la grande galerie d’entrée. Après cinq heures de travail, la voûte d’une galerie perpendiculaire longue de quelques mètres est dégagée. Le fond en est totalement obstrué par une trémie imposante. Quinze jours plus tard, six heures d’un soutirage intensif de cailloutis et de blocs englués d’argile liquide ne viennent pas à bout de la dangereuse trémie verticale qui s’effondre continuellement. Le 13 novembre, l’éboulis se stabilise enfin : huit mètres plus haut, un vide noir apparaît. Le passage n’est guère engageant mais la tentation est trop forte. Pierre le gravit avec la crainte que tout ne s’écroule, condamnant ainsi la sortie. Il débouche enfin, après d’infinies précautions, à la base d’une grande salle « entonnoir » qu’il remonte pour partir en reconnaissance et atteint rapidement une vaste galerie qui s’enfonce sans limite au centre du massif.

L’exploration se poursuit et alors qu’ils déambulent dans le large conduit qui se prolonge dans l’inconnu, au milieu des marmites blanches ou ocres ornant le plafond, Marc Papet apperçoit alors un bloc insolite, soudé au sol par de la calcite blanche : un crâne d’ours des cavernes. L’examen attentif des alentours révèle bientôt un véritable ossuaire de l'espèce.

 

L'endroit n'est pas des plus accueillant, humide, froid... un décor de rêve pour planter une intrigue faite d'assassinats et de chasse au trésor. J. Bertolino ne c'est vraiment pas trompé pour en faire l'un des théâtres de son roman.

La descente est ensuite rapide jusqu'à la Plagne, alors que les touristes et autres randonneurs commencent à arpenter les pentes de la montagne phare des Chambériens.

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