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31.07 / 04.08

     Découvrir la cordillère des Andes... Cela fait trois ans que nous nous préparons à cela. Cela devenait une évidence de nous frotter à cette montagne continent. Sur près de 7000 km de long, elle étire son échine de dinosaure, de la mer des Caraïbes, à l’océan Antarctique. Géant du monde d’en haut avec l’Himalaya, il était tout naturel que l’envie nous prenne d’aller contempler et gravir ses cimes.

 

Nous avons longuement réfléchi sur là où nous poserions les pieds. Pas tellement sur le pays. Équateur, Chili, Argentine... le choix s’est imposé de lui même : le Pérou. Incarnation de l’âme andine ancestrale et moderne de part l’héritage de la civilisation inca. Civilisation montagnarde par excellence tant de part ses réalisations en harmonie avec le milieu, que de sa relation profonde, écoumènique au sens du géographe Augustin Berque, à la montagne. Nous retournerons naturellement dans les Andes pour explorer ces autres fantastiques contrées.

Le choix a davantage été complexe concernant la région andine du Pérou que nous comptions explorer. Cordillère blanche, de Huayhuash, Salkantay... nous n’avions que l’embarras du choix. Pour une fois, le pragmatisme a parlé. Autant lors d’un séjour de trois semaines, visiter le maximum de lieux tout en limitant des déplacements très (trop) chronophages. Nos exigences portaient également sur un trekking qui devait être spectaculaire du point de vue des paysages (si possible pas trop fréquenté) et la volonté de réaliser un sommet de 6000 m afin de dépasser notre record d'altitude du Kilimandjaro.

Le tour de l'Aussangate cumulait toutes ces exigences. Sommet emblématique, lacs à profusion, de nombreux animaux visibles, un sommet de 5500 m réalisable afin de s'acclimater en prévision de notre "6000"... et un itinéraire relativement peu fréquenté au regard de ceux de la cordillère blanche ou du trek de l'Inca.

 

     Dès lors, nous avons organisé notre cheminement péruvien autour de ce trek d'environ une semaine avec un triptyque : Cusco, lac Titicaca et Chachani (6075 m). Afin de faciliter les réservations et de perdre le moins de temps sur place, nous avons chargé l'agence Nomade aventures, spécialisée dans les trekkings, de procéder aux réservations d'hébergements, de transport et à la logistique des treks.

 

Les réservations faites six mois auparavant, nous partons en ce dimanche matin de fin juillet pour l’aéroport d’Orly. Notre voyage débute par une longue attente dans l’espace d’accueil avant d’embarquer sur un vol avec correspondance à Madrid, pour Lima. Comme souvent dans pareil cas, les voyages débutent par de la lecture. C’est une habitude, nous emportons toujours quantité de livres pour abreuver l’âme. Car si le corps s’emplit de nourritures terrestres et du contact avec la terre qu’il parcourt, l’âme a besoin de nourriture spirituelle. Nous suivons d’ailleurs les prescriptions du docteur Tesson, grand voyageur s’il en est, qui déconseille fortement d’emporter avec soi des ouvrages évoquant sa destination. Comme nous allons dans les Andes, nous emportons donc un livre sur la traversée des Alpes et un sur celle de l’Himalaya, le fameux Bérézina de Sylvain Tesson, des polars et quelques guides sur le Pérou dont un excellent traité sur les treks du pays de Vincent Geus, qui sera bien souvent notre bible pour nous échapper des sentiers battus. « La moindre des choses quand on s’invite (chez les autres) est de connaître le nom de ses hôtes. » (S. Tesson, Dans les forêts de Sibérie)

Plaza de Armas (Cusco, Pérou)

La Plaza de Armas de Cusco dominée par la cathédrale (à gauche) et la Compañía, l’église jésuites bâtie en 1571 (à droite).

     Nous voilà à 10 000 kilomètres de chez nous à attendre un vol pour Cusco qui n’arrive pas... les Péruviens ont cela de fantastique que le temps, les minutes qui s’égrènent, n’ont pas de prise sur eux. Notre vol est retardé mais aucune information. Il n’apparaît même pas sur les tableaux digitaux de l’aérogare. Lorsque vous venez demander un complément d’information aux agents de la compagnie Peruvian airlines, nul ne sait. Étrange, déroutant.

Après près de trois heures de retard, nous décollons enfin. Le vol est court mais nous permet de prendre un premier contact avec la cordillère. Immense désertique, somptueuse. Quelques minutes avant notre atterrissage, l’avion croise sur sa gauche le sommet enneigé du Salkatay (6271 m). Il est là. Seul, solitaire, tel un totem s’érigeant au milieu de nul part, dans cet océan de pierre et de poussière.

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Ce sommet est tristement célèbre dans l’histoire de l’alpinisme pour être le tombeau de l’Autrichien Fritz Kasparek, premier vainqueur de la face Nord de l’Eiger avec Anderl Heckmair, Ludwig Vörg et Heinrich Harrer, victime  en 1954 d’une rupture de corniche.

Plaza de Armas (Cusco, Pérou)
Cathédrale de Cusco (Pérou)

la cathédrale, édifiée sur les ruines du palais de l’Inca Wiracocha.

     Premiers pas dans Cusco dans quelques instants. La ville se dévoile alors que l’avion réalise sa manoeuvre d’atterrissage. La cité est là, sous nos pieds, se languissant dans sa vallée perchée à près de 3400m. Ses maisons à toits rouges se déploient sur toutes les pentes entourant le coeur de l’ancienne capitale de l’empire inca. 400 000 habitants résident ici aux confins des Andes. Pourtant, Cusco ne parait pas tentaculaire, plutôt à taille humaine vue du ciel.

Notre itinéraire nous conduisant de l’aéroport, installé par ailleurs au sein même de la zone urbaine, à notre hôtel, situé dans le quartier San Blas, nous laisse découvrir par le petit bout de la lorgnette la ville.

A la différence de Katmandou dont la pauvreté nous avait sautée au coeur, Cusco semble, du moins en son centre, relativement développée.

En faisant le point avec notre routeur sur place afin de caler les derniers détails techniques, nous sirotons notre premier mate de coca. Il s’agit d’une boisson andine à base de feuilles séchées de coca que l’on fait infuser. Cette plante a, dit-on, des propriétés facilitant l’acclimatation. Nous n’aurons de cesse tout au long de notre séjour au Pérou d’en consommer.

Une fois installés et ayant notés quelques bonnes adresses de restaurants, nous partons à pied à la découverte de la ville.

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Notre première étape est réservée à la Plaza des armas dominée par les deux façades imposantes de la cathédrale de Cusco, édifiée sur les vestiges de l’ancien palais de l’Inca Viracocha et la Compañia, l’église des Jésuites.

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En ce qui nous concerne nous débutons l’acculturation à l’étage du restaurant Barrio Ceviche, offrant une vue panoramique sur la dite place en dégustant des spécialités péruviennes. En premier lieu du Ceviche, il s’agit de poisson cru préparé dans une marinade à base de jus de citron, de piment, de coriandre et d'oignon. Il nous a été servi accompagné de patate douce, de manioc, de maïs et du traditionnel arroz con mariscos (riz avec des fruits de mer). Enfin, pour accompagner le tout (comme si cela n’était pas déjà suffisant !) du Jalea à savoir des calamars et autres crevettes frites dans de la chapelure. Histoire de parfaitement se glisser dans la peau d’un Péruvien, nous avons également commandé le célèbre Inca cola à l’étrange couleur jaune fluo et au goût de carambar. Étonnant !

Statue de Pachacutec (Cusco, Pérou)

Statue de Pachacutec sur la Plaza de armas.

     Après cette escapade gourmande, nous prenons un temps pour découvrir l’imposant complexe cathédrale édifié par les colons espagnols en 1559. Nous nous familiarisons avec le style cuscenien au baroque outrancier dont les tableaux étaient chargés d’éduquer les populations locales aux mystères de la foi catholique. Il mêle des références andines aux images traditionnelles de la religion chrétienne aboutissant parfois à des résultats inattendus tel ce tableau représentant la cène du Christ où le repas partagé par les convives est composé d’une un cuy, le fameux cochon d’Inde des Andes et de chicha morada, boisson à base de maïs fermenté. Sur d’autres tableaux, on croise des lamas remplaçant les chevaux, inconnu de la culture andine avant l’arrivée des conquistadores espagnols.

Enfin la vierge apparaît souvent rondouillarde, critère de beauté andine, et dans une robe parfaitement triangulaire, en référence aux Apu (les montagnes sacrées). Un bien étrange syncrétisme métisse.

 

La fin de la journée, nous la passons à flâner, à déambuler dans les rues de la cité péruvienne, de l’avenue del Sol au Qoricancha. Édifié vers 1440 par l’Inca Pachacútec, le temple du soleil impose aux passants toute sa majesté avec ses puissantes et sombres murailles d’andésite. C’est dans ce bâtiment que les momies sacrées des incas étaient conservées. Malheureusement aujourd’hui il ne reste que les soubassements de l’édifice ravagé par les Espagnols qui y ont édifié une lourde église.

     Rester éloignés bien longtemps des sentiers de randonnées n’est pas dans nos habitudes. Il y a une forme d’accoutumance aux foulées lentes et régulières de la marche à pied. Ce virus inoculé dans nos veines depuis bien longtemps déjà, nous pousse irrésistiblement vers les hauteurs de Cusco. Pourtant lors de notre arrivée, notre routeur nous à conseillé de rester relativement tranquilles jusqu’au départ pour le tour de l’Ausangate. Nous rejoignons donc en taxi Tambomachay, afin de nous éviter un effort trop important à nos corps encore en phase d’acclimatation. 

 

Nous allons nous offrir une jolie ballade au milieu de quatre sites incas nous permettant ainsi de rallier Cusco et son imposante forteresse de Saqsaywaman, la tête du puma. L’itinéraire serpente dans les montagnes environnants la capitale de l’ancien empire précolombien sur près de 10 km.

Notre première étape, Tambomachay se trouvent à 3810m. Il s’agissait d’un lieu de repos pour l’Inca et certainement un lieu de culte lié à l’eau d’où la présence d’une fontaine alimentant deux bains rituels.

Face à nous se dressent des collines dépouillées, culminants à plus de 4000m. Le ciel est limpide, l’air cristallin. Le silence est juste troublé par le chuchotement de l’eau toute proche.

 

Nous poursuivons notre route en direction de la colline fortifiée de Puka Pukara, à quelques centaines de mètres seulement de Tambomachay. Il s’agit d’un poste de contrôle militaire qui défendait l’entrée de la vallée de Cusco. 

Quelques kilomètres plus loin nous longeons le hameau de Huayllarcocha et son lac où s’ébrouent des poules d’eau, des ibis de Ridgway ou autres sarcelles de la Puna. Des enfants privés d’école par la grève des enseignants qui secoue le pays depuis de nombreuses semaines, s’amusent avec un chiot, en surveillant distraitement leurs lamas qui ruminent paisiblement. Nous poursuivons notre chemin en empruntant un chemin creux en direction de notre prochaine étape, le temple de la Lune.

 

Nous sommes seuls, au milieu de la campagne, loin de l’agitation de la ville. Nous sommes bien, sereins, reposés au contact de la nature. Nous percevons mieux le lien qui unissait l’ancien peuple andin avec sa terre nourricière, la Pachamama. Au loin, une forme immense se dessine dans l’horizon. Blanche, élancée et massive, barrant la vue de son imposante silhouette de glace. L’apu... la montagne sacrée. La déesse Ausangate. Nos yeux sont magnétisés par cette apparition soudaine. La beauté de la nature est ainsi faite que la vallée dans son ensemble semble converger en procession vers ce lieu saint. Le huaca (roche sacrée) du Temple de la Lune lui est d’ailleurs consacré. Les populations locales continuent d’ailleurs à y déposer des offrandes.

Au pied des vestiges passe un tronçon du Qhapaq Ñan, l’immense réseau routier de plus de 40 000 km édifié par les Incas pour contrôler leur vaste empire. L’axe principal reliait les villes de Pasto (Colombie actuelle) à la région de Santiago du Chili, via Cusco. Le long de cette route parfois pavée, un système ingénieusement organisé de Chasqui Wasi (poste de relais), Pukaras (forts), Tambos (auberges)… permettant à des coursiers à pieds, les Chasquis de véhiculer les informations rapidement.

 

La voie andine nous mène jusqu’à un second complexe religieux, celui de Q’enqo consacré sans doute au culte du puma, avant de nous diriger vers l’imposante forteresse de Saqsaywaman et ses murs cyclopéens.

La citadelle dominant de toute son envergure Cusco, constituait la tête du puma représenté au travers du plan de la capitale des Incas. Elle reprend des éléments de la nature dans l’organisation de son architecture : murs en zigzag évoquant la foudre du dieu de l’orage Illapa notamment.

La démesure du lieu avait pour but de montrer aux peuples de l’empire la puissance de l’Inca.

Après la conquête espagnole, le site fut transformé en carrière.

 

Cette petite promenade revigorante achevée, nous nous dirigeons à nouveau vers la Plaza de Armas afin de déjeuner dans une petite rue adjacente. Rien de bien sophistiqué, un peu de guacamole, de lomo saltado… mais de quoi s’imprégner des saveurs péruviennes avant de visiter le Museo de Arte Precolombino présentant de belles pièces datant des civilisations pré-inca (Mochica, Nazca…). Quel dommage cependant que ces oeuvres soient seulement décrites et ne soient pas contextualisées  afin que l’on en apprenne davantage sur ces empires méconnus.

Puis nous nous rendons à l’église de la Compañia, qui rivalise sans conteste avec la cathédrale voisine, tant les ornementations de son portail et ses fresques dédiées à la gloire de l’ordre fondé par Ignace de Loyola sont remarquables.

     Après deux jours passés à Cusco, nous partons aujourd’hui découvrir les environs et notamment la célèbre vallée sacrée. Notre périple de trois jours doit nous mener successivement à la découverte des principaux sites archéologiques inca : Pisaq, Ollantaytambo, Moray et le célèbrissime Machu Picchu.

C’est en transport privé que nous partons au nord en direction de Pisaq. Après Tambomachay, la route serpente à travers des forêts d’eucalyptus, puis ondule le longs des flans des montagnes environnantes. Après un dernier col, un panorama s’ouvre alors à nous sur la légendaire Valle sagrado de los Incas, le grenier à blé de l’empire pré-colombien. Sur ses terres fertilisées par les crues limoneuses de la rivière Urubamba s’est développée la culture du maïs, des fèves, du lupin, du quinoa ou autre tomates.

C’est sur un nid d’aigle, 400 m au dessus de la confluence des vallées des rios Vilcanota et Chongo, que fut édifié le site de Pisaq à près de 3500 m d’altitude. La fonction précise de ce dernier nous est inconnu, mais sa citadelle assurait certainement la sécurité de l’entrée sud de la vallée, parallèle au Nord de celle d’Ollantaytambo.

Pour nous, c’est le premier contact avec des ruines incas d’une telle importance. Nous sommes véritablement impressionnés par le génie bâtisseur de cette civilisation et l’harmonie avec laquelle ils sont parvenus à bâtir d’immenses terrasses agricoles qui épousent parfaitement les contreforts de la montagne.

12 000 ouvriers furent nécessaires à l’édification du complexe. Le chiffre donne le tournis.

L’organisation sociale et religieuse de l’empire se retrouve à travers la structuration de la cité. Un quartier pour les paysans, Qantus Raqay, avec ses maisons en adobe et ses greniers, et une ville haute Qalla Q’asa, le quartier de la noblesse aux murs de pierre, qui converge vers le quartier sacré d’Intiwatana (« Là où l’on attache le Soleil »), dédié comme son nom l’indique au dieu soleil.

 

Durant 1,5 heure nous arpentons les lieux… c’est bien trop peu. Mais le temps presse et nous devons rejoindre Ollantaytambo où nous attend notre train pour Aguas Calientes la porte du Machu Picchu.

Perú rail est une compagnie ferroviaire détenue par une société chilienne, comme bon nombre d’hôtels d’Aguas Calientes d’après le guide qui nous accompagnera dans notre visite de la cité perdue des Incas.

Il s’agit d’un train avec des voitures panoramiques permettant de profiter pleinement des vues sur les montagnes environnantes, l’apu Veronicá entre autre. Un doux parfum d’Orient express y règne avec son service à l’assiette (cela sera un délicieux gâteau aux carottes en ce qui nous concerne) accompagné d’une boisson revigorante. Nous découvrons ainsi la chicha morada, boisson réalisée à partir de maïs violet.

Le train longe quelques kilomètres du célèbrissime chemin de l’Inca qu’il faut réserver plus de six mois à l’avance. Nous avons fait le choix, malgré l’envie, de ne pas le réaliser. En effet, il faut parfois choisir avec le temps disponible...

 

Aguas Calientes est une cité sans âme, au pied du Machu Picchu. Terminus de la ligne ferroviaire qui vomit son flot ininterrompu de touristes venant s’extasier devant les merveilles de la cité Inca, situées quelques centaines de mètres plus haut.

Il s’agit davantage d’une concentration d’hôtels et de restaurants en tout genre que de véritablement une ville. On s’y presse, on y fait la fête jusqu’à tard dans la nuit. Bien avant l’aube, il faut s’agglutiner le long de sa rue principale pour attraper l’un des premiers bus qui vous mènera au Graal, afin de profiter quelques minutes, loin de l’agitation, de la magie du Machu Picchu en toute plénitude. 

Machu Picchu

     3h du matin, cela pique au réveil. Mais quand il s’agit de rencontrer un mythe, l’effort est toujours plus facile !

Nous nous extirpons doucement à pas feutrés, de l’hôtel Hatun Inti, afin de nous rendre avenue Hermanos Ayar pour attendre longuement le bus qui doit nous mener jusqu’au site du Machu Picchu. De longues heures à lire dans la nuit, assis à même le sol, à la lumière blafarde des réverbères. La fil s’allonge indéfiniment. On se pousse, on s’impatiente, on s’énerve contre ces touristes qui arrivent vers 6 heure et n’ont qu’à prendre la place que leur guide a préservé pour eux au prix de longues heures d’attente…

Et puis finalement, les navettes arrivent. Nous nous glissons rapidement dans l’une d’elles. Le convoi s’ébroue dans l’ombre fuyante du jour et s’élève doucement dans la pente en empruntant les lacets caillouteux de la piste menant au plus fameux site précolombien d’Amérique du Sud, symbole du Pérou et des Andes.

 

Le site est situé sur une arête dominant de 400 m le rio Urumbamba et la forêt amazonienne. Couverts d’une jungle impénétrable, les sommets environnants, à l’image du Putucusi (2560 m), semblent avoir été taillés à la hache.

Nous pénétrons avec respect dans les vestiges archéologiques. Le lieu est impressionnant et particulièrement bien conservé. Le dieu Inti commence à pointer ses premiers rayons sur la belle endormie.

Ayant pris le premier bus, nous disposons de deux heures devant nous avant que la foule n’arrive avec son lot de désagrément. Cela nous laisse tout loisir de découvrir ce bijou architectural en compagnie d’un guide francophone, dont les explications seront fortes utiles à la compréhension des lieux. Nous découvrons ainsi les différents quartiers à la hiérarchie sociale bien marquée, places, maisons royales, grandes zones agricoles, chemins, et observatoires, sans oublier les divers temples dédiés au condor, au soleil comme l’Intiwatana (là où on attache le Soleil).

Dans la civilisation inca, rien n’est laissé au hasard. Ils maitrisent parfaitement la trigonométrie et la géométrie, l’art de la para-sismicité, l’astronomie… L’homme semble en harmonie avec la Terre (Pachamama), qu’il respecte et vénère, et les animaux dont ils semblent puiser sa force.

 

« Juste en face de nous, sur le flanc nord de la vallée, se découpait une immense falaise granitiques en à-pic (…) on voyait le piton solitaire du Huayna Picchu, encadré de précipices qui paraissaient infranchissables. (…) Jamais je n’ai vu de murs aussi bien construits, de monolithes aussi magnifiquement taillés. C’est le plus pur chef-d’oeuvre des Incas »

 

Hiram Bingham

 

Après notre visite guidée, nous profitons encore quelques instants des lieux en nous rendant au pont Inca qui permettait de s’échapper de la cité via Llactapata et Yanatile grâce à un chemin qui emprunte une vire de 80 cm de large.

Puis nous nous dirigeons vers le Wayna Picchu, le pain de sucre péruvien, dont nous comptons bien réaliser l’ascension.

Wayna Picchu

De loin, il paraît inaccessible au randonneur. Pourtant, sur sa face sud-ouest, les Incas y ont construit un escalier autant audacieux que vertigineux.

Pour se rendre au sommet, il faut s’acquitter d’un droit d’entrée supplémentaire et bénéficier de l’une des 400 entrées journalières.

Le Wayna Picchula montagne jeune ») était tout à la fois un poste de surveillance et de communication par signaux, un temple où se déroulaient des sacrifices de lamas et un jardin d’agrément avec ses terrasses esthétiques.

Pour atteindre sa cime altière, il nous faut gravir près de 1250 marches et les gros blocs sommitaux, avant de profiter d’un beau panorama sur le Machu Picchu et son environnement tourmenté.

Pour redescendre, Benoît a prévu de passer par « Gran Caverna », sorte d’énorme diaclase, ainsi nommé par Bingham, puis le temple de la Lune, au milieu de la forêt amazonienne. Le but est de réaliser une boucle que l’on espère loin de la foule. L’idée sera excellente car nous ne croiserons pas âme qui vive en ces lieux. Comme quoi, il est possible de trouver la solitude et la sérénité même dans l’un des sites les plus touristiques du monde. La boucle ne manque d’ailleurs pas d’intérêt avec son échelle en bois à désescalader, son sentier accroché à la pente, sa jungle profonde et son temple secret consacré à la fin du jour et à la mort. Les grandes niches servaient notamment aux dépôts des momies. Une douce atmosphère d’aventure d’Indiana Jones flotte dans l’air.

En début d’après-midi, nous redescendons à Aguas Calientes prendre le train pour Ollantaytambo. Devant la foule en quête sur plusieurs centaines de mètres d’une place dans l’une des nombreuses navettes effectuant une noria ininterrompue, nous choisissons de redescendre à pied.

 

De retour à Ollantaytambo, nous décidons d’aller nous restaurer. Cela restera comme l’un des grands moments de notre séjour dans la vallée sacrée. Notre choix s’arrête sur un petit restaurant sans prétention, l’Apu Veronicá, qui sert une cuisine traditionnelle. Nous optons pour une soupe au quinoa, puis de la truite à la plancha. Ce n’est pas tant le menu qui restera dans les annales mais le comique de situation de l’établissement ! Le personnel semble en effet totalement débordé par la foule qui ne cesse de rentrer. Le patron n’ose refuser de la clientèle, s’efforce de satisfaire tout le monde en leur trouvant une place. On déplace ainsi des clients déjà installés pour les mettre sur une table plus petite, on ramène de nouvelles chaises dont on ne sait où, on réunit sur une même table deux personnes qui ne se connaissent pas pour laisser la place à une famille, les plats sont inversés... Malgré l’attente bien longue pour obtenir nos plats et nos couverts (!) le repas sera excellent et fort apprécié. Nous repartirons amusés de ce spectacle haut en couleurs !

Apu Veronica (Peru)

L'Apu Veronicá (5893 m)

Nous commençons la journée par la visite de la forteresse d’Ollantaytambo, impressionnante de par ses terrasses qui semblent de loin dessiner un lama. Lui faisant face sur le versant opposé, la tête de Tunupa, prêtre légendaire venu de l’Altiplano bolivien.

La forteresse est tout à la fois un lieu de culte dédié une nouvelle fois au soleil, mais aussi à l’eau dans sa partie basse avec sa célèbre fontaine de la Ñusta, mais aussi un site agricole et militaire défendant la route menant de la vallée sacrée à l’Amazonie.

Le village d’Ollantaytambo est l’un des rares au Pérou à avoir conservé son plan inca avec le système de répartition en canchas, des groupes de maisons autour d’une cour centrale que commande une entrée unique.

Forteresse d'Ollantaytambo
Fontaine de la Nusta (Ollantaytambo, Pérou)
Apu Véronica (Pérou)
Ollantaytambo (Pérou)

L'Apu Veronicá (5893 m)

fontaine de la Ñusta

Puis notre taxi nous mène à travers une piste poussiéreuse de montagne vers le laboratoire agronomique inca de Moray. La vue sur le massif de l’Urubamba se découvre petit à petit révélant les splendides glaciers andins caparaçonnant les sommets du Chicón (5530 m), de l’apu Veronicá (5682 m) ou du Sawasiray (5818 m). Nous en profitons pour lier conversation avec notre chauffeur afin d’en savoir davantage sur le mode de vie des péruviens, notamment le fonctionnement de leur système scolaire et politique ou encore sur les synchronismes culturels entre cultures précolombienne et hispanique.

 

Le site archéologique de Moray est constitué de quatre cuvettes en gradins disposées en cercle concentriques. Il s'agissait d'un centre de recherche agricole inca où étaient pratiquées des expériences afin d’acclimater certaines plantes de l’empire aux effets de l’altitude. La position des terrasses crée toute une série de microclimats propices aux différentes cultures.

Une nouvelle fois, nous sommes impressionnés par la maîtrise technique et scientifique de cette civilisation en avance sur bien des points alors que dans le même temps elle ne connaît pas la roue et surtout l’écriture.

Nous reprenons notre véhicule, pour partir en direction des salines de Maras situées 7 km plus loin. Le chemin est toujours très cahoteux. A chaque virage, un nuage de poussière se détache derrière les véhicules qui deviennent de plus en plus nombreux à mesure que nous approchons. Un quad, peut-être gêné par un manque de visibilité fait une embardée dans le fossé, aussitôt percuté par son suivant. Heureusement sans conséquences notables. Plus de peur, que de mal.

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La poussière, fléau des terres arides, contraste avec la verdoyance de la pampa encadrée par le blanc immaculé des cordillères de Vilcabamaba et Urubamba.

Puis, au détour d’un virage, au fond d’une ravine lui servant d’écrin, des alvéoles taillées dans le flanc de la montagne, nacrées de blanc et d’ocre surgissent. Spectacle étonnant, irréel. Le lieu recèle indéniablement un charme particulier, presque mystique. Une certainement forme de transcendance à l’Histoire du monde. Ici à 3300 m d’altitude les vestiges de l’océan originel vomissent des flots figés par le temps. La mer à la montagne...

Maras (Pérou)

Les salines de Maras.

Les salines sont exploitées de la même façon depuis l’époque inca. Des oeillets sont le réceptacle des eaux salées d’une source souterraine, lesquelles s’évaporent doucement sous les effets du soleil, laissant une couche cristallisée de sel d’une blancheur sans égale. Les villageois, propriétaires d’une ou plusieurs parcelles, se sont constitués en coopérative qui se charge de l’exportation de la production.

Salines de Maras (Pérou)
Oeillet (Salines de Maras, Pérou)
Salines de Maras (Pérou)
Salines de Maras (Pérou)
Salines de Maras (Pérou)
Salines de Maras (Pérou)
Salines de Maras (Pérou)

Sur le chemin du retour pour Cusco, nous nous arrêtons en route pour visiter les ruines de Chinchero mais surtout un atelier de tissage artisanal. Charmante rencontre que ces femmes en costumes traditionnelles qui nous communiquent leur savoir-faire ancestral. Cardage de la laine d’alpaga, teinture à base de plantes ou de cochenille, puis lente mais précise réalisation sur des métiers à tisser d’un autre âge, le tout en sirotant un mate de coca. Moment intense et profond comme nous les aimons, ponctué de beaux éclats de rire.

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Respirer le pays, le comprendre, l’apprécier, cela passe sans conteste par la compréhension de ses habitants et de leurs vies au quotidien. Comment partir de Cusco sans avoir traîné nos basques dans le marché San Pedro. Ce marché est rempli de couleurs, de senteurs plus ou moins heureuses. On y trouve une foultitude de choses, que ce soit des habits, des fruits secs, des épices, de la viande qui pour nos estomacs d’européens sur-aseptisés, seraient assurément un passeport pour la tourista, aux jus de fruits frais...

 

Demain, nous tournons une première page de notre grand livre du monde inca en quittant Cusco afin de nous élancer sur les sentiers d’altitude de l’Ausangate.

Inca [R] Nación

20 jours au coeur des montagnes sacrées des andes

DESIRS ANDINS

Ausangate

MONTAGNE SACREE

LAGO TITICACA

MER ANDINE

CHACHANI

A TOUCHER LE CIEL

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